Thalia est le type même des personnes que Fûu exècre. Elle est de celles qui mettent des barrières.
Depuis qu'elle avait identifié Fûu comme une 2nd Class qui passait la majeur partie de ses soirées à boire, embarquer des princesses dans son compartiment ou, plus gênant, à tuer, et pas que des bestioles, la demoiselle s'était immiscée dans sa vie, et n'avait pas l'air de vouloir en sortir. En clair, à chaque fois qu'elle croisait Fûu, elle venait la voir, lui demandait des nouvelles et en particulier si elle avait enfin arrêté ses "pratiques". Et puis quoi encore? Enfin, si ce n'était que ça... Mais comme Fûu ne lui mentait pas, et lui lâchait de but en blanc que non, elle n'avait pas arrêté et n'arrêterait pas d'assassiner ceux qui ne l'inspiraient pas, ça partait très vite en leçon de morale, en vaines tentatives pour la convaincre qu'elle ne pouvait pas juste prendre le premier venu et l'éviscérer dans le premier coin sombre et que si elle était effectivement sûrement là pour casser de la bête elle n'était pas obligée de se déchaîner non plus... Bref, Fûu ne savait pas trop ce qui la retenait encore de la tuer, elle aussi. Sans doute était-ce parce que, elle, elle ne lui voulait aucun mal, du moins en apparence, et elle ne lui avait jamais rien fait d'autre que de l'agacer un peu... Et un peu plus à chaque fois.
Du coup, en général, quand elle l'aperçoit, elle passe son chemin. Mais lorsqu'elle la voit venir vers elle, elle ne se dérobe généralement pas. Devrait-elle fuir les gens qu'elle pourrait tuer, maintenant? Elle supportait ensuite plus ou moins longtemps la discussion qui suivait, et qui dérivait inévitablement sur le sujet qui la foutait de mauvais poil, et, au choix, soit elle l'ignorait, soit elle s'en allait. Pas de temps à perdre avec les pacifistes et les modérés.

Fûu Koshi Nixe des fleuves
Si, dans ce monde, il y a bien une chose que la groenlandaise hait au plus haut point, c'est l'excès. Tout simplement, en temps que grande rabat-joie et pacifiste, elle refuse en toute mauvaise foi aux autres les plaisirs criminels qu'elle n'aurait jamais l'idée de développer.

Fûu, qui ne faisait pourtant de mal que le strict minimum d'un 2nd Class, soit tuer des 1st en toute impunité, eut l'heur de se retrouver face à la petite nordique qui avait, sous le même air blasé, sortit son grand discours d'oratrice au charisme de bulot, soit de longues phrases sur la communauté. Jusqu'au moment où les dits-excès s'étaient légèrement étendus sur son regard, et où Thal' s'était joyeusement aperçue que, ô malheur, l'âme en perdition de la jeune femme en face d'elle était en gros bien abîmée. A ce moment, animée d'une foi quasi-mystique, ou plutôt d'une motivation malsaine, elle s'était jurée d'essayer de poser les limites au monde de Fûu, autrement de la faire chier jusqu'à ce qu'elle lui envoie une tarte dans la tronche. Et le pire, c'est que la nordique pensait alors bien faire, histoire de sauver quelques personnes attirée par le chaos que semait sa "protégée". Et puis, au fur et à mesure, son asociabilité habituelle et son caractère avaient repris le dessus, tandis que l'attitude de Fûu restait la même. Elle se mit à guetter la belle dans les couloirs, avec un air revêche de controller ou de gendarme affilié à une mission particulièrement fatigante. Elle s'énervait sur son caractère, et de l'âme perdue dans les fonds de luxure et de colère, Fûu devint une vouivre, créature aquatique qui attire ses proies à elle avant de les tuer (normalement pour les manger, mais Thalia était certaine que le cannibalisme ne figurait pas dans sa débauche).
Enervée par l'ignorance qui découlait face à ses arguments en béton, elle s'acharnait parfois pendant de longues minutes, tel un chien qui s'accroche à un bifteck, jusqu'au moment inévitable où la proie fatiguée de s'entendre reprocher sa vie entière se cassait, laissant la nordique outrée, voire même vexée au possible, de cet affront abominable.